Maladie de Wilson

Dégénérescence hépato-lenticulaire

PNDSMis à jour

Résumé des recommandations pour le généraliste

  • La maladie de Wilson est une maladie génétique autosomique récessive rare de surcharge en cuivre
  • Les symptômes débutent entre 5 et 35 ans: anomalies hépatiques (tableau d’hépatite, stéatose hépatique), neurologiques (comportement, scolaire, dysgraphie, mouvements anormaux, hypersalivation), psychiatrique (dépression, psychose), gynécologique (aménorrhée, fausses couches)
  • Le bilan de la maladie de Wilson associe: NFS, bilan hépatique complet, cuprémie totale et cuprurie des 24h, céruloplasmine, échographie hépatique (doppler et élastométrie), IRM cérébrale et consultation de neurologie
  • La prise en charge de la maladie de Wilson est pluridisciplinaire (hépatologue du centre de compétence, neurologue) et le traitement à vie associe: zinc ou chélateurs du cuivre (D-Pénicillamine voire sels de trientine), régime pauvre en cuivre initial, dépistage de l’entourage

Maladie de Wilson (MW)
Maladie génétique rare (1,5/100.000) autosomique récessive causant une surcharge en cuivre (hépatique, cérébrale et péri-cornéenne). Elle débute dès l’enfance (exceptionnelle avant 3 ans) avec le plus souvent une déclaration entre 5 et 35 ans (8% après 40 ans) et est toujours mortelle en l’absence de traitement.
Le pronostic est excellent quand le traitement est débuté chez des sujets pauci-symptomatiques. Des formes fulminantes mortelles sont possibles.
La maladie de Wilson est une maladie monogénique par mutation du gène ATP7B du chromosome 13 synthétisant une protéine ATP7B défaillante de transport cuprique. La prévalence des hétérozygotes en France est de 1/31.

Abréviations

CuEXC
cuivre échangeable
MW
maladie de Wilson
PNDS
protocole national de diagnostic et de soins
REC
ratio cuivre échangeable sur cuivre total
TETA
triéthylènetétramine (ou trientine)

« tout retard diagnostique expose le patient à des atteintes irréversibles » – PNDS 2022

Interrogatoire

La présentation de la maladie de Wilson est très variable (hépatique, neurologique, autres) et l’atteinte d’organe est elle-même variable (hépatique asymptomatique, aiguë, chronique voire fulminante).

Les symptômes surviennent le plus souvent chez le sujet jeune:

  • Antécédents
  • Antécédents familiaux: hépatopathie, neurologiques, psychiatriques
  • Traitements en cours
  • Bilans biologiques antérieurs: toute anomalie du bilan hépatique
  • Symptômes hépatiques (45%)
    • Fatigue
    • Douleurs de l’hypochondre droit
    • Tableau d’hépatite: cytolyse hépatique (ASAT et ALAT)
    • Ictère
    • Ascite, œdème des membres inférieurs
  • Symptômes neurologiques (35%, retard diagnostique de 2 ans) apparaissant en quelques semaines à quelques mois
    • Anomalies de mimique
    • Hypersalivation, troubles de déglutition
    • Dysarthrie, dysgraphie
    • Troubles de la marche, tremblements, maladresse, dystonie, mouvements anormaux, ataxie cérébelleuse, syndrome parkinsonien bilatéral et symétrique
    • Baisse des performances scolaires
    • Modifications du comportement (banalisées à l’adolescence)
    • Syndrome frontal, troubles de l’attention
  • Troubles psychiatriques (10%)
  • Symptômes gynécologiques
    Aménorrhée, fausses couches répétées.
  • Autres symptômes:
    • hématologiques: anémie hémolytique Coombs négatif, thrombopénie isolée
    • rénaux: lithiase, tubulopathie
    • ostéo-articulaires: douleurs osseuses, myalgies, ostéomalacie, ostéopénie, arthropathie
    • cardiaques: cardiomyopathie, troubles du rythme, dysautonomie

Examen clinique

  • Poids, taille, IMC
  • Pression artérielle, fréquence cardiaque
  • Palpation abdominale
  • Signes d’hypertension portale
    Ascite, hépatomégalie, circulation veineuse collatérale, encéphalopathie porto-systémique, varices œsophagiennes.
  • Signes d’insuffisance hépatocellulaire
    Angiomes stellaires (thorax supérieur), érythrose palmaire, ongles blancs, ictère conjonctival ou cutané, foetor hepaticus, inversion du cycle nycthéméral, astérixis, confusion, hypogonadisme.
  • Splénomégalie
  • Anneau péri-cornéen de Kayser-Fleischer
    Présent dans 52% des formes hépatiques et 95% des formes neurologiques.

« Un bilan hépatique normal n’élimine pas une atteinte hépatique qui peut alors prendre la forme d’une stéatose ou d’une fibrose évoluant à bas bruit (intérêt du Fibroscan® systématique) ». – PNDS 2022

Bilan de la suspicion de maladie de Wilson

  • NFS
  • Bilan hépatique: ASAT, ALAT, GGT, PAL, bilirubine totale et conjuguée
  • TP, Facteur V
  • Céruloplasmine
  • Cuprémie totale
  • Cuprurie des 24h
  • Échographie hépatique et doppler
  • Élastométrie hépatique (pendant l’échographie)
  • IRM cérébrale
  • Consultation d’ophtalmologie
    L’observation de l’anneau de Kayser-Fleischer nécessite un ophtalmologue expérimenté.
  • Consultation de neurologie systématique à tout âge

Bilan complémentaire au diagnostic:

  • Réticulocytes, haptoglobine, LDH
  • Cuivre échangeable (CuEXC en laboratoire de référence)
  • Examen neurologique systématique

Céruloplasmine

Une céruloplasmine normale (0,2 - 0,4 g/L) n’élimine pas le diagnostic.

Céruloplasmine < 0,14 g/L. Suspicion de maladie de Wilson quand elle est abaissée de 0,14 à 0,19 g/L.

Elle peut être augmentée en cas d’inflammation, d’infection, de traitement par œstrogènes ou de grossesse.

Cuprémie totale

Cuivre sérique le plus souvent bas (< 10 µmol/L ou 635 µg/L) mais peut être élevée en cas d’hémolyse. Suspicion de maladie de Wilson pour un cuivre sérique total de 11 à 13 µmol/L (700 - 830 µg/L).

Cuprémie libre (approximative) = cuprémie totale - 0,3 (céruloplasmine / 100)

Cuivre urinaire des 24 heures

L’augmentation du cuivre urinaire est constante dans les formes neurologiques: > 1,6 µmol ou 100 µg par 24 heures. Suspicion quand le cuivre urinaire dépasse 0,6 µmol/24h.

Elle peut être faussement normale au tout début de la maladie et est alors révélée par un test à la D-Pénicillamine (validation chez l’enfant uniquement).

Cuivre échangeable sérique

Le dosage du cuivre échangeable sérique (CuEXC) est réalisable uniquement dans des laboratoires de référence. Il permet d’affirmer le diagnostic via le ratio REC (cuivre échangeable / cuivre sérique total) quand > 18,5 % et ainsi différencier des hépatopathies.

Il est également utile dans le dépistage familial pour différencier les malades (> 15%) des hétérozygotes.

Le cuivre échangeable sérique est aussi un marqueur de sévérité. > 2,08 µmol/L signe une atteinte oculaire et cérébrale (Se 86%, Spe 94%).

« Toute personne nouvellement diagnostiquée doit être traitée, même si elle est asymptomatique » – PNDS 2022.
Le traitement est poursuivi à vie et doit être débuté le plus précocement possible.

La prise en charge de l’hépatite auto-immune relève de l’hépatologue du centre de compétence des maladies héréditaires du cuivre: annuaire des centres de compétence de la filière des maladies rares G2M (Groupement des Maladies Héréditaires du Métabolisme).

La prise en charge de la maladie de Wilson est pluridisciplinaire (hépatologue, neurologue):

  • Déclarer l’ALD n°17
  • Régime pauvre en cuivre les premières années
    Limiter: fruits de mer, noix, chocolat, champignons et abats.
  • En cas de ré-aggravation: évaluer l’observance
  • Dépistage de l’entourage dans le même centre de compétence
    • Fratrie, parents puis oncles/tantes et cousins germains, enfants dès 3 ans
    • Pas de dépistage du conjoint sauf consanguinité
  • En cas de grossesse, allaitement, contraception: lire le PNDS
  • Guide d’information du patient: la maladie de Wilson en 60 questions (PDF) et Orphanet (PDF)
  • Association de patients: ABPWilson
  • Participer à la recherche: registre Français de la maladie de Wilson

Pour en savoir plus: les traitements spécifiques de la maladie de Wilson

« Tous les patients doivent avoir un traitement spécifique de la MW qui doit impérativement être pris à vie ». – PNDS 2022

Les chélateurs du cuivre et le zinc sont les traitements les plus efficaces de la maladie de Wilson et doivent être poursuivis à vie.

Les traitements ont une prescription restreinte et une délivrance hospitalière:

  • Forme pré-symptomatique: acétate de zinc (Wilzin®) 150 mg/j
  • Chélateurs du cuivre
    • D-Pénicillamine (Trolovol®) 900-1500 mg/j
    • Sels de trientine (TETA, Cufence® ou gén, Cuprior®)

La transplantation hépatique est réservée aux cas d’hépatites fulminantes et au cas par cas pour les formes neurologiques résistantes.

Le rythme de suivi des consultations spécialisées est adapté à la phase de traitement (minimum tous les 6 mois):

  • Bilan biologique: NFS, ionogramme, créatinine, bilan hépatique, TP, Facteur V, cuivre échangeable, cuprurie des 24 heures
    • Chélateurs du cuivre: anticorps anti-nucléaires, protéinurie des 24h si D-Pénicillamine
    • Sels de zinc: lipase si douleurs abdominales, bilan lipidique, zincémie, zincurie des 24h
  • Échodoppler hépatique annuel (semestrielle si cirrhose)
  • Si anneau de Kayser-Fleischer: suivi ophtalmologique annuel