Trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH)
Résumé des recommandations pour le généraliste
- Le trouble chronique du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) atteint 5% des enfants (2/3 de garçons) et 3% des adultes avec des complications médicales, des conduites à risque ayant des conséquences sociales importantes
- Le trouble débute avant 12 ans et persiste plus de 6 mois, avec une hyperactivité ou une inattention retentissant sur l’environnement du sujet (au moins 2 parmi: familial, scolaire, extra-scolaire, amical)
- L’examen clinique en présence des parents et les observations des enseignants sont essentiels pour étayer les plaintes, les antécédents, les symptômes, le cadre de vie et identifier les symptômes qui relèvent de comorbidités ou de diagnostics différentiels
- Des échelles permettent de guider les entretiens avec l’entourage (ADHD-RS, SNAP IV) mais toute suspicion de TDAH doit faire adresser l’enfant ou l’adulte au spécialiste (pédiatre, psychiatre, neurologue)
- La prise en charge non médicamenteuse du TDAH est systématique et associe psychoéducation, psychothérapie TCCE, programmes de guidance parentale, adaptations scolaires … (voir Traitements non médicamenteux)
- Le traitement médicamenteux de référence du TDAH de l’enfant est le méthylphénidate (prescription initiale spécialisée), renouvelé par le généraliste tous les 28 jours. Il doit le plus souvent être poursuivi à vie (voir Traitements médicamenteux)
- Trouble déficit de l’attention avec hyperactivité (ou sans hyperactivité – TDAH)
- Trouble neurodéveloppemental avec inattention et/ou hyperactivité/impulsivité persistants plus importants que ce qui est attendu pour l’âge, interférant avec le fonctionnement de la personne. Les causes sont mal identifiées.
- Les symptômes débutent dans l’enfance avec une forte prévalence (5%), atteignant principalement les garçons (2/3) et sont chroniques (3 % des adultes atteints).
- 3 présentations cliniques prédominent:
- présentation hyperactive/impulsive prédominante (pré-scolaire ++)
- présentation inattentive prédominante
- présentation combinée
- Les complications du TDAH sont multiples:
- organiques: asthme, allergies, obésité, diabète, hypertension, psoriasis, épilepsie
- conduites à risque: alcool et drogues, infections sexuelles, violences, accidents, jeux, suicide
- professionnelles et sociétales: chômage, arrêts maladie
« Comparés aux enfants nés en janvier, les natifs de février ont 7% de risque supplémentaire de se voir prescrire du méthylphénidate, ceux d’avril 9%, ceux de juillet 29%, ceux d’octobre 46% et ceux de décembre 55%. » et « Les mêmes tendances ont été observées concernant les séances d’orthophonie ».
– ANSM 2024
Abréviations
- HAS
- Haute Autorité de Santé
- TDAH
- trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (ou TDA-H)
- MPH
- méthylphénidate
- PEHP
- Programmes d’Entraînement aux Habiletés Parentales
- TCCE
- thérapies comportementales, cognitives et émotionnelles
- TND
- troubles du neurodéveloppement
- WFADHD
- World Federation ADHD
L’ordre d’apparition des troubles est important pour déterminer un diagnostic différentiel d’une comorbidité ou d’une complication du TDAH.
Classe | Trouble | Exemples de signes d’alerte et conseils |
---|---|---|
Autres TND | Troubles de développement du language, des sons et de la parole | Enfant inintelligible après 3 ans, manque de vocabulaire, déformations des sons, erreurs syntaxiques, troubles de la compréhension verbale |
Troubles des apprentissages (dyslexie …) | Déficit dans l’apprentissage de la lecture, production écrite, calcul et raisonnement logico-mathématique | |
Tb développemental de la coordination | Maladresse anormale, difficultés de coordination, lenteur ou imprécision | |
Tics | Fréquemment associés | |
Syndrome de Gilles de la Tourette | Tics verbaux et moteurs répétés involontairement. TDAH souvent associé | |
Trouble du spectre de l’autisme | Peut ressembler à des troubles attentionnels, interactions sociales également perturbées. Association possible au TDAH. De 0 à 12 ans, adresser vers une PCO | |
Trouble du développement intellectuel | Peut être associé, voire aggravé par un TDA | |
Troubles externalisés | Trouble d’opposition provocation (TOP) | Comportement hostile, provocateur, colérique. L’opposition n’est pas un symptôme de TDAH |
Troubles des conduites | Comportements délictuels à l’encontre des règles sociales | |
Comportements à risque | Consommation de substances psychoactives | Début précoce, évaluer les consommations |
Comportement sexuel à risque | IVG, IST | |
Usage excessif des jeux et des écrans | ||
Troubles anxieux | Trouble anxieux généralisé, anxiété de performance, refus scolaire anxieux, anxiété sociale, anxiété de séparation | Possibles irritabilité et agitation motrice et psychique ou inhibition comportementale ou anxiété de performance invalidante |
Troubles obsessionnels compulsifs | TOC | Obsessions, compulsions, rituels |
Troubles de l’humeur | Épisode dépressif caractérisé | Modification nette et récente de l’humeur, plus fréquent chez l’adolescent. Tristesse, idées suicidaires non exprimées spontanément, observées par des colères et irritabilité |
Trouble disruptif avec dysrégulation émotionnelle | Comportement explosif (rage, accès de colère d’intensité et fréquence supérieures à l’âge développemental) | |
Troubles bipolaires | Antécédents familiaux, humeur labile, irritabilité épisodique, troubles du sommeil. Rares avant l’adolescence | |
Psycho-traumatisme | Trouble de l’adaptation | Lié au stress, surtout transitoire, rechercher une rigidité cognitive |
État de stress post-traumatique (ESPT) | Modifications du comportement après 1/+ évènements traumatiques. Évitement, hypervigilance, reviviscence, troubles du sommeil. | |
Trouble réactionnel de l’attachement | ||
Maltraitance | Envisager systématiquement, sous toutes ses formes (dont harcèlement scolaire) | |
Troubles du sommeil | Insomnie, parasomnies | Très fréquents ainsi que le retard de phase. Le sommeil non réparateur peut se traduire par une hyperactivité, irritabilité, troubles de concentration |
Syndrome d’apnées obstructives du sommeil | Ronflements, pauses, sueurs nocturnes, nycturie, respiration buccale. Diurne: fatigue au réveil, troubles de l’attention, hyperactivité, somnolence, sommeil non réparateur | |
Narcolepsie | Endormissements diurnes irrépressibles, cataplexie, hallucinations hypnagogiques | |
Syndrome des jambes sans repos | Besoin irrépressible de bouger les jambes suite à des sensations désagréables, soulagées par le mouvement, maximales le soir. Comorbidité fréquente | |
Énurésie | Comorbidité fréquente | |
Obésité | Comorbidité fréquente | |
Troubles du comportement alimentaire | Boulimie, anorexie mentale | |
Épilepsie | Surtout épilepsie absence: perte brève et brutale du contact, automatismes | |
Déficit visuel ou auditif | Contrôle clinique systématique | |
Endocrinopathie | Dysthyroïdie, diabète, hyperplasie congénitale des surrénales | |
Intoxication | Plomb, mercure, syndrome d’alcoolisation fœtale | |
Médicaments | Corticoïdes, valproate pendant la grossesse | |
Maladie génétique | Syndrome de l’X fragile, délétion 22q11 ou 7q11.23, Prader-Willi, Angelman, neurofibromatose de type 1 |
Le diagnostic de TDAH est posé par un spécialiste de la maladie (pédiatre, psychiatre, neurologue ou formation dédiée) à tout âge, même en présence de comorbidités psychiatriques (HAS, WFADHD). « Il est recommandé de poser le diagnostic conformément aux critères diagnostiques cliniques définis dans la CIM-11 ou le DSM-5-TR (similaire à la CIM-11 sur ce point) ». – HAS 2024
Interrogatoire
Les signes et symptômes de l’évaluation d’un TDAH s’apprécient par rapport à ce qui est attendu pour l’âge précis et le contexte (avant 5 ans, uniquement si les symptômes sont disproportionnés).
L’évaluation du trouble déficit de l’attention/hyperactivité est au mieux réalisée avec les parents et les enseignants. Chez l’enfant (adolescent ++), un moment d’entretien seul est aussi important. Plusieurs consultations sont souvent nécessaires.
- Chez l’enfant: considérer l’âge avec le mois de naissance
- Antécédents médicaux
Psychiatriques, obstétricaux, prématurité. - Antécédents familiaux
TDAH, TND, psychiatriques, addictions, autres. - Traitements en cours
- Alcool et toxiques
- Enfant: développement psychomoteur, cognitif, langagier, psychologique
- Environnement: familial (situation, composition, langues, évènements), scolaire, extra-scolaire, amical
- Mode de vie
- Alimentation
- Activité physique
- Performances scolaires et attitude vis-à-vis de l’école et lors d’activités extrascolaires et fluctuations
- Harcèlement scolaire
- Usage des écrans
- Ancienneté et installation des troubles, évolution
Symptômes persistants depuis plus de 6 mois, début avant 12 ans. - Recueil des symptômes et plaintes
- Interventions essayées et mises en place
- Syndrome d’inattention
Prédominant chez la fille.- Difficultés à se concentrer et à maintenir la concentration
Manque d’attention aux détails, étourderies. - Distractibilité
Propres pensées ou stimuli externes. - Difficultés d’organisation
Gestion du cartable ou de l’agenda. - Procrastination
- Évitement de l’effort cognitif (devoirs scolaires)
- Difficultés à comprendre et suivre les règles et consignes
- Lenteur d’exécution
- Difficultés à se concentrer et à maintenir la concentration
- Syndrome d’hyperactivité / impulsivité
- Activité excessive, désordonnée, mal contrôlée, non efficace
- Instabilité motrice: incapacité à rester assis (ou sans bouger), court partout
- Hyperactivité présente en permanence (famille, social, extra-scolaire)
- Impulsivité: agit ou parle sans réflexion sur les conséquences
Précipitation, incapacité à attendre son tour, prise de risque (traverser la route).
- Retentissement sur ≥ 2 environnements: familial, scolaire, extra-scolaire, amical
- Aménagements mis en place
- Dépister des comorbidités psychiatriques (80%), qui sont également des diagnostics différentiels
- Troubles du sommeil (ronflement, fatigue au réveil), troubles du comportement alimentaire
- Troubles du comportement: TOP ++, troubles des conduites
- Autres troubles du neurodéveloppement: troubles des apprentissages (50 à 80%; dyslexie, dysgraphie, dyscalculie, dyspraxie), handicap intellectuel, TSA, TIC
- Troubles anxieux (33%), dépression
- Addictions
- Évaluation du risque suicidaire
Plaintes évocatrices de TDAH
Sujet | Plainte |
---|---|
Enfant | - Peu/pas d’amis - Conflit avec les parents - Faible estime de soi |
Famille | - Distraction, n’écoute pas - Difficultés d’organisation, manque d’écoute - Agitation, conduites dangereuses - Impatience, coupe la parole |
Enseignants | - Rêveur, distrait - Difficultés de concentration, mémorisation, autonomie |
Examen clinique
- Poids, taille, IMC, périmètre crânien, courbes de croissance
- Pression artérielle, fréquence cardiaque
- Vue, audition
- Stade pubertaire
- Auscultation cardio-pulmonaire
- Examen neurologique et test oculomoteurs
- Examens auditifs et visuels
- Évaluation du langage, de l’écriture, de la lecture, du calcul
- Échelles d’aide à l’entretien pour les parents et les enseignants: ADHD-RS, SNAP IV
Échelles de Conners non validée en français. - Guide de l’entretien diagnostique: KIDDIE-SADS
DIVA enfant non validée en français.
Les tests et questionnaires peuvent aider à objectiver des troubles mais n’ont pas de puissance diagnostique.
L’évaluation est poursuivie par un spécialiste du trouble (pédopsychiatre, psychiatre, pédiatre, neuropédiatre, neurologue) et une équipe de niveau 2 avant 5 ans.
« Il n’existe pas d’examen complémentaire ou de biomarqueur pouvant confirmer le diagnostic de TDAH ». – HAS 2024
Bilan biologique
Le bilan biologique n’est pas systématique en cas de suspicion de TDAH ou de traitement par méthylphénidate.
Selon le contexte, des éléments peuvent être recherchés: TSH.
Bilan neuropsychologique
Le bilan neuropsychologique n’est pas nécessaire pour le diagnostic de TDAH. Il peut être utile pour le suivi ou l’évaluation de diagnostics différentiels.
Un test « normal » n’élimine pas le diagnostic de TDAH.
Exemples d’indications au bilan neuropsychologique: symptômes sévères, troubles multiples associés, suspicion de trouble du développement intellectuel (TDI).
Tests des fonctions attentionnelles et exécutives: TEA-CH ou KiTAP (attention de l’enfant), NEPSY-2 (évaluation neuropsychologique), TAP (attention), d2-R (attention visuelle dès 9 ans), Brown (exécutives de 6 à 18 ans), BRIEF et BRIEF-P (exécutives)
Bilans paramédicaux
Les bilans paramédicaux (orthophonique, ergothérapique ou psychomoteur) sont ciblés selon les déficits du patient.
Mesures générales de prise en charge du TDAH
« Les mesures thérapeutiques et rééducatives des troubles du neurodéveloppement doivent être précoces, intensives, multidisciplinaires et adaptées au profil clinique de chaque individu. » – CNUP
Les prises en charge non médicamenteuses sont systématiques et le suivi spécialisé (pédopsychiatre, psychiatre, médecin spécialiste du trouble) est au moins annuel:
- Suivi régulier: symptômes, traitements
- Activité physique régulière
- Rester en contact avec l’enseignant, la famille et les spécialistes
- Psychoéducation
Expliquer le diagnostic, le trouble, détailler les interventions, répondre aux questions. Sites: TDAH Informations, Société canadienne de pédiatrie, CADDRA (PDF), CléPsy - Programmes d’Entraînement aux Habiletés Parentales (PEHP)
Pour les parents, programmes en groupe pour adapter les stratégies éducatives (livres de référence). - Psychothérapie: thérapies comportementales, cognitives et émotionnelles (TCCE)
- Prise en charge des comorbidités: orthophonie, psychomotricité, ergothérapie …
- Accompagnement scolaire et pédagogique (guide info enseignant HAS et guide de l’académie (PDF))
- Aménagements scolaires (des examens, programme Personnalisé de Réussite Éducative, Plan d’Accompagnement Personnalisé, voir education.gouv), Projet d’Accueil Individualisé (PAI)
- Si intensité nécessitant des aménagements scolaires: dossier MDPH
Peut apporter: matériel et aménagements pédagogiques (Plan Personnalisé de Scolarisation), Allocation Education Enfant Handicapé (AEEH), aide par un accompagnant d’élève en situation de handicap (AESH). - Associations de patients: HyperSupers TDAH France, TDAH Pour une égalité des chances et TDAH Partout Pareil
- Demande d’ALD 31
Niveau de preuve insuffisant pour: régimes spécifiques, psychanalyse, neurofeedback, entraînement cognitif, pleine conscience, autres psychothérapies, kinésiologie, ostéopathie, acupuncture.
Traitement médicamenteux du TDAH de l’enfant: le méthylphénidate
Guide patient méthylphénidate (PDF) et guide info psychostimulants (PDF).
Le traitement médicamenteux du TDAH est nécessaire pour les formes sévères (ou résistantes aux mesures générales) et est poursuivi aussi longtemps que nécessaire, en monothérapie en première intention. Des interruptions temporaires de traitement sont possibles (ex. vacances).
- Le méthylphénidate LP (MPH-LP – Concerta, Medikinet, Quasym, Ritaline, gén, AMM dès 6 ans) est le traitement de première intention chez l’enfant et l’adolescent (guide)
- La primo-prescription et le renouvellement annuel sont réservés au spécialiste (psychiatre, pédiatre et neurologue)
- Renouvellement tous les 28 jours sur ordonnance sécurisée ou numérique par le généraliste (adaptations possibles)
- Le suivi sous méthylphénidate comporte: observance, effets indésirables, croissance staturo-pondérale (avec IMC et appétit) tous les 3 mois, pression artérielle et fréquence cardiaque (minimum tous les 6 mois), addictions à consigner dans le dossier (guide de suivi HAS)
Effets indésirables: anorexie, ralentissement de la croissance staturo-pondérale, retentissement cardiovasculaire, troubles du sommeil, symptômes psychiatriques, troubles du comportement. Éviter la prise de MPH LP en fin d’après-midi à cause du risque d’insomnie.
Précisions sur le méthylphénidate
- La titration initiale du méthylphénidate est réalisée sur 4 à 6 semaines (début 0,3 mg/kg/j, cible 0,5 à 1 mg/kg/j – la dose maximale)
- Des doses de libération immédiate (LI) sont parfois nécessaires en fin de journée
- L’arrêt brutal est possible
- L’atomoxétine (Strattera) en AAC est le traitement de 2e intention et la clonidine en 3e intention
La mélatonine à libération immédiate peut être associée en cas de troubles de l’endormissement.
Traitement du TDAH de l’adulte
Chez l’adulte, le traitement est systématique par méthylphénidate (AMM seulement si traitement depuis l’enfance) ou amphétamine en première intention (atomoxétine en cas d’addiction).
Le traitement est le plus souvent nécessaire tous les jours.
D’autres traitements médicamenteux sont possibles: stimulants (amphétamine) ou non (atomoxétine, bupropion, clonidine LP, guanfacine LP, modafinil).